Le Droit au logement et la loi de 1994 proposée par NDH

Adopté le 24 juillet 1994 pour éradiquer la mort par le froid

« Le bruit fait peu de bien ; le bien fait peu de bruit » disait Saint François de Sales. C'est bien là tout le problème en ces temps étranges de surmédiatisaton, quand faire savoir compte plus que faire. 

Fin 2006, à l'initiative des Enfants de don Quichotte tous les médias se sont emparés du sujet des SDF, avec quelque succès, heureusement, dont l'issue a été le vote de la loi sur le droit au logement opposable voulu par le président de la République, Jacques Chirac. Saluons comme il convient l'effort accompli. Mais qui s'interroge sur le point de savoir pourquoi il a fallu la « scan- dalisation » pour aboutir à cette avancée ? Les élus de la nation, les journalistes, deux catégories d'acteurs hélas fort discréditées, en sont cause, ce qui ne les empêchera pas de poursuivre dans la même voie. Dès lors, est-ce à nous de remettre en cause nos méthodes ? De nous mettre en avant, de nous mettre en scène en quelque sorte ?

Peut-être, bien que cela soit assez répugnant. Car on n'agit pas pour la gloire.

Brassens lorsqu'il avait chanté « Trompettes de la renommée » l'avait pourtant très bien décrit, interrogeant sur le point de savoir « s'il devait battre tambour avec ses parties génitales » pour se faire entendre. Cher vieux Georges il savait pourtant que « nul n'est prophète en son pays ». On aurait du l'écouter.

Ainsi, à part Ségolène Royal, nul n'a songé à rappeler la loi que NDH a fait voter en 1994 avec le soutien de l'Abbé Pierre. Loi qui, quarante ans après son appel célèbre, son cri du cœur, venait rationnellement compléter ce qu'il avait obtenu par charité, générosité sans que cela fut suffisant puisqu'on continuait à mourir de froid dans un pays riche. Voilà pourquoi nous reprenons cette action afin que l'on ne pense pas abusivement qu'il n'y a que le scandale qui fait bouger les choses.

Que disait notre proposition de loi ? Que la République impose à toutes les villes de créer des abris ouverts 24 heures sur 24, 7 jours sur 7 en nombre proportionnel à sa population. Dorénavant, nul ne pourrait plus dire « vous m'avez laissé mourir de froid avant de s'endormir ».

Insuffisant ? A n'en pas douter mais c'était un pas en avant décisif vers une solution du problème lancinant des SDF. Eradiquer la mort n'est pas rien. Il aurait fallu y ajouter l'obligation, y compris par la force, de se réfugier dans ces abris sous peine de non assistance à personne en danger de mort (comme on a obligation de prévenir les suicides). Il aurait fallu que les animaux, souvent seuls compagnons des exclus y soient admis. Il aurait surtout fallu prendre à bras le corps la question du logement durable de tous les laissés pour compte. Mais, là encore, l'autisme généralisé d'une société fait que seules les initiatives des ONG font progresser les choses. C'est vrai, au fait : pourquoi nos « gauchistes » sont-ils toujours restés les bras croisés face à ce tragique drame ? Tout comme les écolos de tout poil n'ont jamais exigé la reconnaissance du droit à vivre dans un environnement sain que nous réclamions près de trente ans...

 A vouloir trop, on ne fait rien.

Quand l'Abbé Pierre a tiré sa révérence, il était comique de voir les crocodiles verser leur larme sur son cercueil. Je rappellerai que lorsque le saint homme a tenu une conférence de presse à nos cotés pour épauler notre proposition de loi, il n'y avait que M6 pour l'entendre et que seul PPDA a annoncé le vote de cette loi... tandis que l'Humanité s'en gaussait. On peut être fier du fonctionnement de la démocratie en France. Mais qui en tirera les conséquences ? Vite, des états généraux et des cahiers de doléances, comme en 1789 et surtout, de nouveaux droits de l'Homme.

Loi pour l'éradication de la mort par le froid

Lassés de voir des gens non seulement mal logés mais, pire, condamnés à mort l'hiver par le froid et l'indifférence des autres, NDH a souhaité éradiquer, cette honte pour un peuple car il s'agit d'un véritable délit de « non assistance à personne en danger ».

NDH a donc rédigé une proposition de loi imposant l'ouverture d'abris dans toutes les villes avec des places au prorata de la population.

Adressée à tous les parlementaires, ceux-ci l'ont votée à l'unanimité de l'Assemblée nationale en juillet 1994.

Mise en place, ce projet a sauvé de nombreuses vies. Seuls ceux qui ne veulent pas se protéger risquent désormais la mort par le froid.

Ci-dessous la proposition de loi et la loi telle qu'elle a été votée.

Proposition de loi de NDH

Janvier 1994

Article 1 : Chaque commune de plus de 10 000 habitants doit aménager sous sa responsabilité des locaux existants ou à créer permettant d'abriter gratuitement toute personne économiquement faible qui en fait la demande et assurer que ce lieu ait une température d'au moins 19 degrés centigrades ainsi qu'un minimum sanitaire.

Article 2 : Ces refuges, asiles de nuit et accueils de jour sont obligatoirement ouverts aux demandeurs entre le 1er octobre et le 15 mars sans aucune condition d'admission.

Article 3 : Toute commune dont le nombre d'habitants est supérieur à celui fixé par la présente loi doit être en mesure d'assumer l'application effective de ce droit au moins à une personne par 2000 habitants dans les villes de 10 000 à 100 000 habitants ; à une personne par 1000 habitants dans les villes de plus de 100 000 habitants.

Article 4 : Le financement de ces abris est assuré par quart par les communes, le département, la région et l'Etat.

Article 5 : Ces obligations communales minimales légales s'entendent nonobstant tout ce qui pourrait être fait en plus, en mieux et en tout temps, avec l'aide des conseils généraux, des conseils régionaux, de l'Etat, des organisations non gouvernementales et des citoyens afin de rendre effectif un véritable droit minimum à un hébergement humain.

Article 6 :

I) Les dépenses supplémentaires pour les collectivités, résultant de la présente loi sont compensées à due concurrence par une majoration de la DGF qui leur est affectée.

II) La perte de recette pour l'Etat, engendrée par le I et les dispositions de la présente loi est compensée à dûe concurrence : par un relèvement des droits prévus aux articles 575 et 575A du Code Général des Impôts.

Article 7 : Un décret d'application sera pris par le Premier ministre dans le mois qui suivra l'adoption de cette loi.

Loi telle qu'elle a été adoptée

24 juillet 1994

Journal Officiel

Loi n°94-624 du 21 juillet 1994

Relative à l'habitat

L'Assemblée nationale et le Sénat ont adopté,

Le Président de la République promulgue la loi dont la teneur suit :

Dispositions relatives au logement des personnes à faibles ressources et à l'hébergement d'urgence des personnes sans abris.

Chapitre III

Art. 21 - Un plan pour l'hébergement d'urgence des personnes sans abri est établi sans chaque département au plus tard le 31 décembre 1994. ce plan est élaboré par le représentant de l'Etat en association avec les collectivités territoriales et leurs groupements dotés de la compétence en matière de logement ainsi qu'avec les autres personnes morales concernées, notamment les associations, les caisses d'allocations familiales et les organismes d'habitations à loyer modéré.

Le plan départemental analyse les besoins et prévoit les capacités d'hébergement d'urgence à offrir dans des locaux présentant des conditions d'hygiène et de confort respectant la dignité humaine.

La capacité à atteindre par bassin d'habitat est au minimum d'une place pas tranche de 2000 habitants des communes ou de leurs groupements dotés de la compétence en matière de logement de 10 000 à 100 000 habitants et d'une place par tranche de 1 000 habitants et des communes ou de leurs groupements dotés de la compétence en matière de logement de plus de 100 000 habitants.

Des conventions conclues entre les personnes mentionnées au premier alinéa définissent annuellement les conditions de mise en œuvre des dispositions prévus par le plan départemental.

Dans un délai de deux ans à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement présentera au Parlement un rapport sur le bilan d'application de cette disposition et les éventuelles modifications à y apporter.